Le paradoxe c’est que les bilans se sont améliorés en 2020. Privilège des sociétés cotées, elles ont facilement accès aux capitaux sous forme de dette ou de fonds propres. Une étude récente d’Euler Hermes souligne ce point et montre que dans l’Union Européenne ou au UK les sociétés cotées de tous les secteurs d’activité ont vu leur position cash augmenter. Le risque extrême d’effondrement financier est donc réduit par rapport à l’ère pré Covid en considérant que le risque de malversation reste une constante faible mais présente quel que soit le cycle.
En revanche l’excès de valorisation, est un risque âprement débattu.
Les mesures de prime de risque, calculées par simplification comme l’écart entre
le rendement des bénéfices (bénéfice/cours de bourse- soit l’inverse
du PER-) et le niveau des taux longs
(prenant en compte ou non l’inflation), reviennent sur les points bas
d’un historique récent. Les PER en moyenne
long terme ont un profil proche des moments les plus tendus de la bulle tech.
De manière pragmatique, les valorisations sont peu prédictives des mouvements de court terme des marchés. En revanche plus on paye cher un marché ou un titre, y compris pour des motifs compréhensibles (1-niveau des taux bas et 2-croissance exceptionnelle des profits), plus il sera difficile de s’assurer d’un bon rendement à terme pour peu que les conditions (les deux facteurs précités) retrouvent des niveaux plus standard. En deux chiffres, une société que l’on paie 35x en PER se paiera encore 14x après 5 ans de croissance des profits à 20% à cours inchangé. La performance sera en revanche largement au rendez-vous si le statut de la croissance ne s’érode pas. Une situation particulière : lorsque le niveau élevé de PER provient d’une chute massive et exceptionnelle des résultats. Ce fut le cas en 2020. Et 2021 démarre à moitié normalisé...
Un point d’attention est la divergence des valorisations au sein des marchés. Certains secteurs comme la technologie ou les services de communication ont bénéficié d’une prime exceptionnelle de valorisation qui vient inflater la moyenne générale compte tenu de leurs poids dans les indices. Les écarts de PER ont été poussés à l’extrême courant 2020 et il y a eu un début de timide convergence en fin d’année et au premier trimestre 2021 : le rallye Value (valeurs décotées à caractère plutôt cyclique) vs Growth (Valeurs de croissance de qualité). Des ré équilibrages sont encore attendus à la marge. La recherche de valeurs performantes est maintenant beaucoup plus méticuleuse, dans tous les secteurs, y compris les financières. Et les opérations financières de toute nature (Introductions en bourse, spin off, fusions etc.) qui enrichissent la cote de nouveaux noms favorisent cette approche disciplinée.
Le niveau des taux est bien sûr un facteur de soutien aux valorisations, d’un point
de vue fondamental, c’est-à-dire par la détente des conditions de financement
des entreprises. En effet du côté des taux d’actualisation pratiqués dans nos modèles,
ceux-ci sont restés bloqués à 7%-8% depuis quelques années...
Il reste à prendre en compte l’effet des plans de relance dont la taille cumulée
est considérable et qui sont orientés vers l’environnement et la technologie.
Les gagnants et particulièrement sur les sociétés de niche auront des parcours remarquables.
Les effets de ces investissements s’inscrivent dans la durée et vont créer de nouvelles
disruptions qui s’affranchiront au moins temporairement des aléas habituels qui mobilisent
nos réflexions d’investisseurs.
Achevé de rédiger le 6 mai 2021