La question nous était venue en lisant les propos du PDG du groupe pétrolier Total : « Nous sommes responsables de nos émissions propres (de CO2), celles sur lesquelles nous pouvons agir, mais pas de celles générées par la consommation des produits par des clients »
L’élévation non linéaire de la température de la planète au travers des émissions anthropiques de CO2 est incontestable. Mais peut-on attribuer uniquement la faute au consommateur et à son comportement non citoyen ? De toute évidence, de l’efficacité des mesures d’adaptation proposées par les autres parties prenantes que sont l’État et les entreprises dépendent les options futures. Cependant la consommation raisonnée du citoyen fait son chemin.
Isabelle Delattre
Directrice Finance Responsable
Crédit Mutuel Asset Management
Il y a encore quelques décennies, l’offre s’imposait au consommateur (1ers colorants chimiques alimentaires après-guerre, 1er hypermarché français Carrefour en 1963...). Il faudra attendre le début des années 90 pour voir apparaître les premiers scandales sanitaires et les premiers questionnements. La prise de conscience de la transition climatique et sociale accentuée par les récents évènements sanitaires auront accéléré la notion de citoyen respectueux de l’environnement notamment local. Le citoyen (la demande donc) contraint de plus en plus l’offre. L’étape de la surconsommation laisse la place à une consommation raisonnée et responsable : 90% des consommateurs européens se disent y être sensibles et ont le sentiment d’agir vers cet objectif (étude février 2020, Oney/OpinionWay). Le gaspillage alimentaire est en tête des préoccupations des citoyens y compris l’obsolescence programmée. En moyenne, plus de 80% des consommateurs européens ont déjà acheté des produits d’occasion et sont aujourd’hui prêts à limiter les loisirs polluants...
Cependant, 90% des sondés disent attendre de l’engagement (offres et solutions) de la part des marques, le critère de choix du prix restant incontournable.
L’impact de l’action individuelle sur l’urgence climatique n’est pas négligeable sur 3 thématiques : le logement, l’alimentation et le transport.
Par exemple, sur la thématique de l’alimentation, la difficulté de quantifier l’empreinte carbone repose sur l’absence d’harmonisation des méthodes de comptabilisation fondées sur la consommation.
L’Institute For Climate Economics (I4CE, étude académique février 2019) estime à 28% la part de la demande alimentaire dans les estimations mondiales de gaz à effet de serre, sachant qu’environ 75% sont émis durant la phase de production, 15% entre la sortie du centre de production et la vente et... 10% après la vente.
Notons qu’environ 63% de cette empreinte provient des produits de l’élevage en première approximation, hors transport,énergie utilisée...
Retenons que la bataille est collective : en effet, l’approche de la « consommation durable » repose sur les convictions et la liberté de choix du citoyen forgées par une meilleure information sur les hypothèses et les impacts futurs en vue de la transition climatique. Dans ce cadre, les États ont un rôle sensible à jouer dans la chaîne de valeur en termes de régulateur et de sensibilisateur au niveau local, mais également à l’international.
Achevé de rédiger le 13/07/2020