Les gaz à effet de serre (GES) sont des composants gazeux qui absorbent le rayonnement infrarouge de la surface de la planète et participent ainsi au réchauffement de l’atmosphère.
Il existe 2 catégories de GES :
- Les gaz industriels que l’on ne trouve pas dans la nature (par exemple les halocarbures) issus de l’activité industrielle de l’homme, ceux-ci représentent aujourd’hui une part faible de l’origine de la hausse des températures. Ils n’en restent pas moins dangereux dans leur potentiel de réchauffement.
- Les gaz naturels, présents dans l’atmosphère avant l’émergence de l’homme mais également « produits » par l’activité humaine. Parmi ceux-ci, figurent entre autres :
- La vapeur d’eau qui est jugée peu dangereuse car elle ne reste qu’une semaine dans l’atmosphère et disparait sous forme de pluie
- Le dioxyde de carbone (CO2), de loin le plus connu. Le CO2 d’origine humaine représente 65% de l’effet de serre dû à l’Homme. Il est d’ailleurs devenu la norme de mesure des gaz à effet de serre. Chaque tonne de GES émise est « traduite » en équivalent tonne de CO2 par l’application d’une grille de pouvoir de réchauffement
Le méthane, présent dans l’agriculture (riz, élevage), les décharges et l’industrie pétrolière et gazière, est responsable de 15% des émissions de GES. Son pouvoir de réchauffement est 25 fois celui du CO2
L’Agence Internationale de l’Energie (AIE) vient d’ajuster son bilan annuel des émissions mondiales de méthane (Global Methane Tracker 2022). L’agence tire la sonnette d’alarme sur les écarts très importants constatés entre les déclarations individuelles de chaque pays et la réalité mesurée par des études satellitaires menées conjointement par le CEA, le CNRS et la société Kayrros. Celles-ci dévoilent que les émissions réelles sont au moins supérieures de plus de 70% à ce que les États déclarent.
Les satellites en question ont détecté sur une période de 2 ans 1 800 panaches de méthane, correspondant soit à des fuites accidentelles dans des opérations de maintenance sur des sites d’extraction d’énergies fossiles soit à des rejets volontaires non déclarés. Ces détections sont elles-mêmes sous estimées : les satellites ne pouvant pas détecter les émissions trop proches de l’équateur ou ayant lieu en altitude, au milieu de nuages.
Tous les inventaires nationaux sous-estiment les volumes d’émissions de méthane, mais les pays ayant sur leurs sols ces sites d’extraction de gaz ou des installations pétrolières sont particulièrement concernés. Il n’est pas surprenant de trouver dans cette liste des pays comme les États-Unis, la Russie, l’Iran, l’Algérie mais aussi le Kazakhstan et le Turkménistan. Ce dernier pays concentre à lui seul 1/3 des émissions détectées.
Les mines de charbon chinoises sont également montrées du doigt. Les émissions de méthane associées à ces mines équivalent à la totalité des émissions de CO2 du transport maritime international.
L’IAE estime que ces émissions indues ont représenté au total en 2021 180 Mds de mètres cube de gaz naturel, soit l’équivalent de la totalité du gaz utilisé dans le secteur de l’énergie en Europe.
Le secteur Energie émet lui-même environ 135 Millions de tonnes de méthane par an, soit 40% des émissions totales de méthane d’origine anthropique. Ce chiffre est en augmentation de 5% par an. Hormis les États-Unis, aucun des principaux pays émetteurs de méthane n’a signé le Global Methane Pledge de la COP26 qui prévoit une réduction de 30% des émissions d’ici 2030. Cet engagement semble donc difficile à tenir.
Plutôt que d’adopter une politique basée sur des objectifs de réduction, l’IAE milite maintenant pour une approche « zéro tolérance ». Des mesures comme l’interdiction du torchage ou l’instauration obligatoire de systèmes de détection de fuites peuvent permettre de réduire de 50% à 75% ces émissions inutiles, d’après l’Agence.
Un critère économique est venu récemment à la rescousse de l’IAE et des ONG inquiètes de cette situation. Le prix en forte hausse de l’énergie rend de nombreux projets gaziers rentables, y compris l’activité de récupération du méthane rejeté ou pour limiter les fuites involontaires.
Comme pour le dioxyde de carbone (CO2), le méthane d’origine anthropique pourrait bénéficier de toute l’attention qu’il mérite grâce à l’argument financier... à défaut d’être pris au sérieux pour ce qu’il est : une menace pour la survie de nombreuses espèces et un levier important dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Achevé de rédiger le 28 mars 2022