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L’atmosphère des assemblées générales a été particulièrement tendue cette année, et notamment autour de la thématique climat. Face à la radicalité des manifestants, certaines sociétés comme TOTAL et ING ont dû recourir aux forces de l’ordre. La moyenne du temps de parole consacré au climat a grimpé en raison des nombreuses questions posées par les investisseurs. À l’inverse, celui dédié aux rémunérations s’est contracté, mais le mécontentement s’est reporté dans les votes. La saison a été marquée également par la polarisation croissante entre l’Europe et les États-Unis, avec l’apparition du mouvement anti-ESG.

« Say on climate » : après le pic de 2022, une inflexion durable ?

Les 40 résolutions « Say on climate », déposées à l’initiative des représentants des Conseils d’administration, devraient se réduire à 23 cette année, proches de la performance de 2021.

Pour la France, 9 sociétés, dont 5 nouvelles ont proposé ce type de résolution, vs. 10 en 2022. La consultation des actionnaires peut s’opérer annuellement ou à un horizon trisannuel selon l’avancée de la stratégie votée à une AG antérieure. Une généralisation des « Say on climate » sous cette forme pourrait s’imposer très prochainement à toutes les sociétés. Espérons néanmoins que cette obligation s’accompagne d’un cadre précis sur la stratégie employée et les objectifs poursuivis afin d’éviter le Greenwashing. Actuellement, les acteurs de secteurs clefs (institutions financières, utilities...) sont contraints au dépôt de ces résolutions s’ils ne veulent pas nuire à leur réputation en esquivant le débat. Et globalement, ils sont encouragés par les taux moyens d’approbation actuels, autour de 90%, qui peuvent apparaître comme de véritables plébiscites avec une résonnance positive au sein de l’entreprise.

Les résolutions dissidentes s’étendent à l’Europe

Les résolutions environnementales externes, portées directement par les actionnaires, progressent dans le monde et particulièrement en Europe. Selon la Fintech Scalens spécialisée dans les votes en AG, leur proportion a dépassé les 33% pour la première fois en 2023 et recueilli en moyenne 24% de votes favorables contre 4% en 2022. Le secteur de l’énergie concentre par nature une large partie de ces résolutions. Ainsi, pour la France, deux ont été déposées : une chez Engie et l’autre chez TotalEnergies qui a vu ses actionnaires approuver à plus de 30%, la résolution portée par Follow This et une coalition de 17 investisseurs européens. Les États-Unis accoutumés à ce genre de résolutions, parfois plus nombreuses que celles portées par le Conseil lui-même, en recense 5 attribuées aux majors pétrolières : ExxonMobil et Chevron.

Le mouvement anti-ESG s’affermit

La faiblesse du soutien des résolutions climatiques constatée aux États-Unis s’explique en partie par le mouvement Anti-ESG dominé par plusieurs États américains qui se sont détournés des sociétés de gestion auxquelles ils avaient confié leurs capitaux, les accusant de manquer à leur devoir fiduciaire. Sous cette pression et jugeant ces « résolutions trop prescriptives », BlackRock n’a approuvé que 7% de résolutions avec des critères environnementaux, contre 22% en 2022 et 45% sur la période 2020-2021.

Néanmoins, BlackRock, avec ses 9 500 Mds$ d’encours sous gestion et des millions de clients, reste sous des tirs croisés. Au retrait de centaines de millions de dollars de fonds par l’État de la Louisiane, ce gestionnaire doit faire face aux critiques de la ville de New York qui s’inquiète... du manque d'ambition en matière de transition climatique.

Dans ce contexte, une clarification sur le devoir fiduciaire s’avère nécessaire pour l’association britannique pour l’investissement et la finance durables (UKSIF) (24 000 Mds£ d’actifs sous gestion). Car ainsi, les gérants de fonds de pension seraient plus confiants lorsqu’ils agissent pour le compte de leurs clients et au final plus enclins à investir dans l’économie durable et responsable.

Les fortes augmentations de salaires ne passent pas

À l’échelle mondiale, les rémunérations ex-post et ex-ante ont représenté environ 40% des résolutions contestées (approbation inférieure à 80%) et 41% des résolutions rejetées. S’agissant du SBF 120, environ cinquante résolutions ont été votées avec moins de 80% de votes favorables. Jamais autant de scores sont passés en dessous des 60%/70%, que Scalens justifie en raison de la forte progression des rémunérations fixes, en moyenne + 11% en 2023 contre + 4% en 2022. Parmi les rémunérations les plus contestées, celle d’Alexandre Bompard, PDG de Carrefour : ses émoluments 2022 ont été acceptés à seulement 56,75% et sa politique de rémunération à 60,69%.

Un bilan prometteur pour le dialogue actionnarial

Les actionnaires européens adoptent les pratiques américaines de dépôt de résolutions externes et obtiennent des résultats encourageants. En témoigne le bon score à l’AG d’Engie et de TotalEnergies qui a fini par accepter l’inscription d’une résolution externe à l’ordre du jour après un refus en 2022.

Au global, le mouvement anti-ESG reste contenu aux États-Unis où les fonds durables représentent seulement 1% des encours, contre 21% en Europe, zone qui concentre 86% des encours mondiaux. Soulignons que la réduction des résolutions environnementales peut s’expliquer aussi par le basculement vers plus de questions à caractère social.

Enfin, le succès d’un « point inscrit à l’ordre du jour » à l’AG de Carrefour qui a finalement abouti au dépôt d’une résolution climatique par le Conseil, apparaît aussi prometteur.

Selon notre vision, ces réussites devraient conduire rapidement les investisseurs à multiplier les dépôts de résolutions externes auprès cette fois des acteurs du transport automobile et aérien, ainsi que des institutions financières.

Achevé de rédiger le 06 octobre 2023

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