RECHERCHEZ UN FONDS

Acte 1 – Mauvaise surprise

Contrairement à ce que nous pensions sur les derniers jours de décembre 2021, les actions ont commencé 2022 sur une note négative.

La plupart des bourses mondiales comme les marchés obligataires ont aligné de longues séries de baisses hebdomadaires. Les actions perdaient, à la fin du 1er semestre, pour les plus attaquées (actions américaines, européennes et émergentes) 19 % et les obligations 15 %.

Ce contre-pied est venu d’un changement radical de la politique monétaire de la Fed en janvier, qui, dans le but de maîtriser l’accélération de l’inflation, a décidé de resserrer rapidement sa politique monétaire en relevant son taux directeur de 50 bp en mars 2022.

À côté de ce premier choc, deux autres mauvaises nouvelles sont venues fortement alimenter l’inflation des prix (à la consommation et à la production) mondiaux et pousser les Banques centrales à devenir de plus en plus restrictives. La première : l’arrivée du variant Omicron, en Chine, infectant fortement et rapidement la population chinoise. La seconde : la déclaration de guerre de la Russie sur l’Ukraine, qui affectait la confiance des entreprises, des consommateurs et des investisseurs.

Ce contexte a continué de se dégrader suite à la décision d’un grand nombre de Banques centrales, notamment la Fed entrée en lice à la fin mars, qui se sont mises en mode anti-inflation.

Nous avions remanié notre allocation mi-février en réduisant le poids des actions lorsque les Banques centrales ont montré leurs armes contre l’inflation et nous l’avons sécurisée lorsque nous avons entendu le bruit des bottes, avant le début du conflit.

Acte 2 – Le rebond éphémère de juillet et la rechute d’août

Fort rebond des marchés financiers qui ont effacé, en partie, la chute des 6 mois précédents. L’indice MSCI des actions mondiales est néanmoins resté dans le rouge (-15 % en $, -5,1 % en €) depuis le début d’année, mais a progressé de 7,9 % (10,9 % en €) en juillet. En parallèle, les obligations ont regagné aussi du terrain, +1,8 % pour l’indice mondial.

Pour autant, ce rebond était paradoxal. Il reposait sur les bons résultats des entreprises du premier semestre, sans regarder le ralentissement qui s’annonçait et dans la perspective que les Banques centrales allaient rapidement arrêter leurs resserrements.

N’adhérant pas à ce scénario, nous avons maintenu la sous-pondération de la poche actions, avec un petit avantage aux actions américaines qui semblaient moins touchées par les conséquences de la guerre en Ukraine que le reste du monde.

Acte 3 – Un rallye d’automne qui a dérapé aux premiers frimas

Les marchés financiers se sont redressés en octobre. Les bourses du monde développé ont progressé (+6,4 % pour le MSCI Monde développé), tandis que les marchés émergents, pénalisés par la mauvaise santé de la Chine, étaient en recul (-3,45 % pour le MSCI Pays émergents). Du côté des marchés obligataires, des progrès se sont matérialisés : +1 % pour les obligations gouvernementales de la zone euro et +1,4 % /1,6 % pour les obligations d’entreprises.

Pour autant, cette amélioration ne nous semblait pouvoir être que transitoire. En effet, nous n’avions aucun signe de progrès dans l’économie mondiale. L’inflation était toujours forte. Les Banques centrales continuaient de resserrer leur politique monétaire. L’économie mondiale ralentissait et s’approchait de la récession. Autant de facteurs qui ont entretenu un environnement anxiogène qui a bridé l’appétit pour le risque des investisseurs.

Ragaillardis par le repli des prix de l’énergie (pétrole, gaz et électricité), la détente des pressions inflationnistes, surtout aux États-Unis et paradoxalement l’espoir de voir venir un ralentissement de l’économie mondiale, les marchés ont poursuivi leur rallye d’automne. En effet, ces trois éléments étaient susceptibles d’amadouer, voire de changer, la politique monétaire des grandes Banques Centrales.

Dans ces conditions, nous avons suivi la vague haussière sans renforcer nos expositions ; trop de vents contraires étaient susceptibles de changer la donne, notamment du côté de 1/ l’inflation qui était toujours vigoureuse, notamment l’inflation sous-jacente et 2/ les entreprises dont le ralentissement à venir devait éroder les bénéfices.

Et nous avions eu raison car cette tendance haussière s’est arrêtée avec les premiers froids. La raison de ce changement brutal était principalement due 1/ aux interventions des Banques centrales, dont l’inattendue Banque du Japon, qui ont envoyé un message amer aux investisseurs (un durcissement de leur politique monétaire) et 2/ les inquiétudes liées à la Chine suite au déconfinement total des habitants et le nombre de malades, désorganisant les usines de production ainsi que les services. Aux États-Unis, le marché actions, assez bien valorisé et principalement composé de valeurs de croissance, restait pénalisé par le durcissement de la politique monétaire de la Fed et la hausse des taux longs américains. Dans ces conditions, nous avons maintenu notre sous-pondération des actions en général, sauf sur les actions européennes revenues sur des valorisations raisonnables.

2023, attention aux dérapages

Le scénario économique mondial – désynchronisation des pays et incertitudes fortes

Aujourd’hui, la croissance aux États-Unis résiste grâce à une bonne tenue de l’investissement des entreprises, de la consommation et du commerce international.

En zone euro, nous nous approchons de la récession suite au choc inflationniste, la crise énergétique et le durcissement de la politique monétaire de la BCE.

En Chine, la situation reste difficile à cerner. À court terme, la reprise risque d’être chaotique (comme ce fut le cas lors des premières réouvertures post confinement dans les autres pays), mais l’épargne accumulée devrait permettre un rebond courant 2023, grâce à l’effet rattrapage.

Pour l’instant, notre scénario est celui d’un ralentissement, mais l’ampleur de ce dernier reste difficile à quantifier compte tenu des incertitudes sur la dynamique de reprise chinoise et sur l’évolution des matières premières, dont l’approvisionnement n’est pas stabilisé.

L’inflation

Aux États-Unis, elle semble maîtrisée, les prix à la consommation comme ceux de la production ont reculé sur les 6 derniers mois. En zone euro, l’inflation semble toucher son « pic ».

L’inflation devrait refluer de part et d’autre de l’Atlantique, mais elle restera au-dessus des objectifs des Banques Centrales.

Les Banques centrales

Compte tenu des perspectives de croissance et d’inflation, les Banques centrales devraient encore maintenir une politique monétaire restrictive, sans forcément la réduire, contrairement à ce que les marchés semblent anticiper actuellement.

Les conséquences sur les marchés

Actions : nous restons prudents à court terme, car il reste encore des révisions à venir sur les prévisions de résultats, mais l’environnement pourrait devenir plus positif courant 2023 avec une stabilisation des taux longs, la reprise en Chine post politique zéro Covid, et une situation moins tendue sur le front de l’énergie en Europe. Retour le 20 décembre 2022 à un positionnement plus favorable aux actions européennes dont la valorisation raisonnable intègre déjà beaucoup de mauvaises nouvelles. Le contexte en Europe est pour l’instant moins morose qu’attendu.

Obligations : le rendement ajusté du risque est favorable. Dans le contexte actuel de ralentissement, les taux longs devraient se stabiliser courant 2023, les obligations devraient donc bénéficier d’un portage redevenu très positif avec une volatilité plus modérée.

Marchés obligataires

Bilan

Les deux principaux sujets qui ont animé les marchés de taux en 2022 ont bien évidemment été l’inflation et le resserrement monétaire. La vigueur de l’inflation a forcé les principales Banques centrales à remonter significativement leurs taux. La Fed a ainsi procédé à une hausse de 425 bp de ses taux Fed Funds tandis que la BCE a remonté ses taux directeurs de 250 bp sur l’année. La remontée des anticipations de taux et la correction des primes de risques crédit a entrainé un choc obligataire (en zone euro les performances 2022 ont été en fort repli : -18 % pour les obligations d’État, -14 % pour les obligations privées IG, -11 % pour les obligations privées HY. Le marché monétaire termine l’année avec une performance proche de 0). Les courbes de taux se sont fortement aplaties jusqu’à s’inverser tant en Europe qu’aux États Unis. La forte remontée des taux courts (l’Ester termine l’année à +1,9 %) a alimenté le retour de l’appétit des investisseurs pour le monétaire en seconde partie d’année. Sur l’obligataire, la normalisation des anticipations de taux et des primes de risque a drainé l’appétit des investisseurs pour le crédit Investment Grade au dernier trimestre (avec des taux de rendements autour de 4 % sur le crédit IG euro au dernier trimestre).

Perspectives

En 2023, la normalisation progressive de l’inflation devrait permettre aux Banques centrales de continuer à réduire dans les prochains mois l’amplitude des hausses de taux puis de terminer leur resserrement monétaire dans les prochains trimestres. Elles devraient toutefois continuer (pour la Fed) et initier (pour la BCE) la réduction des tailles de leur bilan. Cela devrait maintenir les taux et primes de risque sur des niveaux élevés sur les marchés obligataires, même si l’essentiel du parcours haussier est selon nous désormais effectué. Les courbes de taux devraient progressivement se repentifier dans les prochains mois. Au-delà des segments monétaires et crédit Investment Grade, nous pensons que l’ensemble des segments de taux (y compris le crédit High Yield et les dettes émergentes) devraient être attractifs en 2023, non seulement sur les maturités courtes et intermédiaires, mais également sur les maturités longues (compte tenu de la repentification attendue en seconde partie d’année). Il faudra néanmoins privilégier les meilleures catégories de notation, en particulier sur le crédit High Yield, pour lequel la catégorie de notation BB offre selon nous le meilleur couple rendement/risque.

Marchés actions

Bilan

Une année 2022 marquée par la géopolitique, la guerre en Ukraine et la montée des tensions en Asie ; la fin des politiques accommodantes des Banques centrales, un swing saisissant de taux négatifs à des portages positifs ; et la lente résolution des dysfonctionnements des chaînes d’approvisionnement générées par les conséquences du Covid. Ces éléments ont constitué un socle mouvant pour les marchés actions qui ont réagi à chaque évolution, enrayant la dynamique de redémarrage basée sur la croissance des profits qui marquait l’année 2021, après les confinements.

Cinq phases de marché peuvent être comptabilisées sur l’année 2022, soit autant qu’au cours des 3 précédents exercices cumulés. Chaque phase (minimum +/- 5 %) a été caractérisée par des marqueurs différents en reflet du contexte. Les prévisions furent ainsi réajustées drastiquement trimestre après trimestre y compris par les Banques centrales concernant l’inflation. L’année 2022 ne se caractérise pas par un effondrement des résultats, mais par un phénomène de réajustement des multiples de valorisation en regard des hausses de taux et en anticipation d’un changement de régime d’appréciation du risque après le "There Is No Alternative" (TINA, il n’y a pas d’autre choix) favorisant les actifs à risque en période de taux négatifs.

En cours d’année, la perspective d’un ralentissement marqué, cumulé avec les tensions sur les prix impactant les coûts de production, a tempéré les projections, laissant toute l’influence des hausses de taux affecter le sentiment des investisseurs sur les capacités de valorisation des titres.

Le fil conducteur des prix de l’énergie, le pétrole et le gaz, particulièrement en Europe, a imprimé sa marque au niveau des performances sectorielles ainsi qu’en termes de masse des bénéfices des sociétés cotées. Les indices mondiaux du secteur énergie progressent de plus de 40 % quand l’indicateur global accuse une chute de plus de 15 %. Typique de cette période, l’indice anglais est un des rares à terminer l’année positif grâce à son exposition pétrolière et matières premières et à sa faible sensibilité aux valeurs technologiques.

L’importance en valeur absolue des résultats des compagnies pétrolières a limité l’impact des contractions de marges sur l’évolution des bénéfices au niveau global des indices actions, en compensant la contraction des bénéfices de certains autres secteurs industriels, affectés par la hausse des coûts de production et les pressions inflationnistes.

Perspectives

La révolution inédite opérée sur les taux en 2022 laisse espérer des ajustements marginaux par comparaison en 2023. Les taux positifs permettent de nouveau de chiffrer le coût du risque pour l’investisseur. Les niveaux absolus atteints sur les taux longs fin 2022 ne constituent pas historiquement des freins à la performance des marchés actions pour peu que les perspectives de résultats soient au rendez-vous.

Deux éléments seront clefs si l’on raisonne hors « cygnes noirs » (extensions des zones conflictuelles). Un signal de stabilisation des taux directeurs venant des Banques centrales, libérant l’hypothèque sur la contraction des multiples et propre à surprendre positivement le marché. Un effet moins coûteux qu’anticipé de la lutte contre l’inflation sur la croissance économique, ce qui éviterait une récession capable de choquer significativement les résultats des sociétés cotées.

Le niveau de valorisation des marchés actions est redevenu raisonnable. Le retour à un univers de rendement risque traditionnel compte tenu du portage positif sur les emprunts d’État ne constitue pas un obstacle insurmontable pour un investisseur non averse au risque et qui se projette sur les horizons de placement conseillés en actions. Les évolutions à attendre reposeront sur la capacité de croissance au niveau microéconomique, avec des éléments de surprise incontournables, mais dans un cadre de volatilité moins critique qu'en 2022.

Enfin, les tensions sur les prix de l’énergie ont constitué un accélérateur puissant pour favoriser la mise en œuvre de la transition énergétique. Cette tendance de fond devrait s’imposer de manière significative et guider les choix des investisseurs, ainsi que les autres critères ESG, mieux renseignés par les sociétés.

Achevé de rédiger le 10 janvier 2023

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