Alors que la COP 26 vient juste de se clore de manière décevante avec la publication d’un texte final dont les ambitions semblent bien limitées au regard des besoins d’actions élaborés par le monde scientifique, il n’est pas inintéressant de porter un regard neuf sur l’évolution de la réponse américaine au changement climatique.
L’ambassade de France aux USA a publié en octobre 2021 un rapport complet qui expose l’ensemble des initiatives publiques et privées mises en œuvre dans le pays pour réduire l’empreinte carbone des acteurs économiques. Ce rapport fait l’inventaire des technologies en cours de développement et les risques induits par leur implémentation. Il détaille les financements dédiés et tente de mesurer les bénéfices attendus de ces solutions.
3 grandes catégories d’initiatives se dégagent :
- Les technologies de captage, d’utilisation et de stockage du CO2 (Approche « CCUS »)
Ces solutions sont perçues comme des options très prometteuses de réduction des émissions finales. Elles consistent à capter le CO2 dès qu’il est émis, à l’injecter dans des formations géologiques appropriées pour l’y stocker de façon permanente ou à l’utiliser dans les processus de fabrication d’objets manufacturés.
De nombreux projets se sont développés dans cette filière : 10 des 19 sites de recherche de taille industrielle sont logés sur le territoire national, 6 sont déjà économiquement viables. Ils prévoient le stockage de 25 MtCO2/an.
Si ce chiffre ne représente que 0,5% des 5 000 MtCO2/an émis par le pays, il n’en bénéficie pas moins de beaucoup d’attention du Gouvernement Fédéral qui a financé 4 Mds USD en Recherche et Développement depuis 2012 et accorde un crédit d’impôt (dispositif 45-Q) pour chaque tCO2 captée.
L’industrie pétrolière a perçu cette filière comme une opportunité de développement et propose de développer les capacités de captage à hauteur de 500 MtCO2 d’ici à 2030, soit 10% des émissions territoriales. - Les solutions fondées sur la nature (Approche « NBS »)
La capacité naturelle des écosystèmes terrestres à piéger le carbone par la production de biomasse et le stockage dans les sols est une autre voie d’élimination du carbone atmosphérique. Entre autres solutions, on peut citer : le changement d’affectation des sols, la restauration d’écosystèmes dégradés, l’apport de matériaux dans les sols permettant un meilleur captage du carbone.
Les projets développés sur ces solutions ne sont pas de nature industrielle mais reposent sur des initiatives localisées et de petites envergures qui pourraient être déployées sur l’ensemble du territoire. Ils n’ont pas fait l’objet de financement important par l’État Fédéral. En revanche, les fondations émanant de grands groupes (Walmart, Apple...) semblent vouloir utiliser ces solutions pour apporter leur contribution à la réduction des émissions de GES mais aussi améliorer leur image. Ces projets sont souvent suivis et soutenus par les ONG, particulièrement dynamiques sur le sujet (World Resources Institute, The Nature Conservancy...). De nombreuses start-up sont également présentes : Climate Action Reserve, Nori, CarboCulture...
La nouvelle administration Biden souhaite aujourd’hui renforcer le financement de ces activités. On peut citer la création de la US Carbon Bank ou le projet Civilian Climate Corps du Department of Interior. - Les approches de modification du rayonnement solaire (Approche « SRM »)
Ce qui peut sembler être tout droit venu d’un roman de science-fiction est un ensemble de projets qui visent à ralentir le rythme du réchauffement planétaire par la manipulation du bilan énergétique de la Terre.
Ces solutions très technologiques et non conventionnelles sont diversement appréciées du fait des risques potentiels nouveaux (impacts climatiques incertains) et sont souvent présentées comme un recours ultime en cas de dépassement significatif de l’objectif de 2°. Les financements dans ce domaine portent essentiellement sur la recherche théorique et nécessiteraient une gouvernance internationale, ce qui est aujourd’hui un défi.
La nouvelle administration Biden semble particulièrement volontaire pour promouvoir la recherche et le développement de technologies visant à réduire ou éliminer le CO2 une fois émis dans l’atmosphère. L’Energy Act, voté en décembre 2020, prévoit un budget fédéral de 4,7 Mds USD sur 5 ans pour ces projets. Par ailleurs, une partie du plan « Infrastructure » de 1 200 Mds USD voté il y a un mois, prévoit l’accélération du captage du carbone.
Il n’en reste pas moins que tous ces projets ne portent pas de solution de réduction du CO2 rejeté dans l’atmosphère mais plutôt de son captage après émission pour éviter l’effet de serre et le réchauffement qui en découlent. A la différence de l’Union Européenne dont l’essentiel des budgets « Climat » porte sur la réduction de l’Empreinte Carbone.
C’est par le prisme des opportunités économiques que la question climatique est aujourd’hui abordée outre-Atlantique. La sobriété carbone n’y est pas encore à l’ordre du jour.
Achevé de rédiger le 13 décembre 2021